MATIN
Les équipes continuent de travailler sur les grandes thématiques du présent (mobilité, temps, société, forme urbaine, nature, technologie). Pour structurer l’ensemble ils posent des mots clés en rapport avec ces thématiques sur le mur des hypothèses. Des couleurs soulignent les rapprochements sémantiques entre mots du passé et mots de présent tel que « surproduction », « suspension », « insouciance », « innovation ».
Après les premières timidités face à la page blanche; le mur d’inspiration est maintenant largement nourri par la documentation réunie par les équipes. Le réseau d’images et de références gagne surface et en épaisseur tout en se structurant progressivement par la manipulation directe des mots-clefs et images.
Exercice prospective 1 : Que sont les signaux faibles ?
par Raphaële Bidault-Waddington
En prospective, plusieurs méthodes existes. On peut s’appuyer sur des tendances lourdes ou être à l’écoute de signaux faibles. Les tendances lourdes sont des évolutions linéaires sans grandes variation. Les signaux faibles sont quant à eux des tendances émergentes qui existent de manière minoritaire ou embryonnaire. Ces tendances peuvent prendre de multiples formes et peuvent être appliqués à tout type d’activité : des arts de vivre, à l’émergence d’une technologie, au rapport au pouvoir, etc. Le passage d’une existence minoritaire du signal faible à son déploiement généralisé constitue une innovation de rupture.
Pour exemple, on peut identifier des moments forts dans le temps historique identifié dans les images sources. La période historique observée grâce à ces images débute dans les années 1880’s pour s’achever aux alentours des années 1970’s. Cela correspond approximativement à l’adaptation de la ville aux impacts de la Révolution Industrielle. On peut noter à ce sujet l’émergence d’un autre paradigme, le passage dans une période de Troisième révolution industrielle qui est notamment théorisée par Jeremy Rifkin. Bien que cette pensée commence à être connue, leur mise en pratique sur le terrain effectif de la ville reste largement à explorer. En cela, l’approche de J. Rifkin peut être envisagée comme un signal faible.
Dans un premier temps, trouver des signaux faibles peut relever d’une démarche intuitive sur ce qui semble novateur, porteur d’avenir. Celle-ci doit s’appuyer sur une connaissance des tendances actuelles qui demande à être nourrie par une veille régulière. Pour dépasser le stade de l’intuition, il faut ensuite contextualiser ces signaux faibles puis les croiser, les faire dialoguer. Durant le workshop, la contextualisation se fait par la discussion collective au regard du mur d’inspiration. L’exercice consiste à repérer des signes pour les interpréter au l’aune de la notion de signal faible.
Voici sous forme de liste la majeure partie des nombreux thèmes abordés :
Les transports, les modes de déplacement, la mobilité
- Évolution de l’échelle spatio-temporelle (temps / vitesse ; proche / loin)
- Accès
- Usages des transports
- Coexistence de moyens et types de transport
- Autonomie des transports
- Service de transports
La technologie, la robotique, le numérique
- Expérimentation
- Immersion
- Données
- Vie augmentée, ville augmentée
- Ville intelligente (Smart City)
- Data déluge / démence digitale
- Milieu numérique
- Interfaces
- Ubiquité / Identités multiples / synchronisation
- « Ubérisation »
Le travail et le temps libre
- Loisir au travail
- Délocalisation
- Gratuité
- Fin du salariat
- Auto-entreprenariat
- Revenu universel
- Tiers-lieux
- Activité
- Ludique
L’économie
- Économie « collaborative »
- Effets du capitalisme
- Fin du salariat
- Transformation du travail
L’environnement
- Épuisement des ressources / limites
- Climat / réfugiés climatiques
- Agriculture / agriculture urbaine
- Élevage
L’énergie
- Quantité
- Stockage
- Réseau
- Cloud
- Synergie
- Monitoring
- Smart Grid
- Internet Of Things (IoT)
La sécurité
- Surveillance / contrôle
- Sur-représentation de l’ordre
- Production de contrôle (alimentation, énergie)
- Confiance
- Liberté
- Etat d’urgence
L’humain
- Démographie / surpopulation
- Vieillissement de la population
- Expérience de l’homme dans la ville
- Expérience sensible
- « Burn out » épuisement social
- Politique / contrôle social
- Stratégies de résistance
- Traces / Transparence
- Frontières / protection / conflits
L’éducation et la culture
- Accès
- Égalité
L’aménagement
- Villes / ilots autonomes
- Ilot de chaleur urbain
- Structure radio-concentrique des villes
- Villes nouvelles
- Verticalité
APRÈS-MIDI
Exercice prospective 2 : Développer des hypothèses “Et si ?”
par Philippe Durance
Après ce regard sur les différentes thématiques et leurs regroupements puis la réflexion générale sur la notion de signal faible, pendant 30 minutes les participants travaillent individuellement. De manière rythmée, ils rédigent individuellement des hypothèses futures à partir de l’interrogation « Et si ? ». Pendant une demi-heure, une frénésie de possibles. Les participants sont ensuite invités à déposer leurs propositions sur le mur des hypothèses. Par exemple : Et si il y faisait 10°C de plus ? Et si la capitale était Marseille ? Et si il n’y avait plus d’argent ? Et si Paris devenait totalement piéton ? Et si tout était possible de chez nous ? Et si on pouvait vivre 150 ans ? Et si la ville était un organisme vivant ? Et si on vivait sous l’eau ? Et si tout était instantanné ?
A tour de rôle quelques participants prennent un « Et si ? » et racontent la vision qu’ils en ont. D’abord une participante choisit « Et si on révolutionnait le travail ? ». Il n’y aurait alors plus de chômage, plus de système de côtisation. Le rapport aux autres serait valorisé dans l’entraide. Le sujet du revenu universel est abordé. Un autre choisit « Et si l’homme vivait éternellement ? ». Il n’y aurait plus qu’une seule et même génération, il n’y aurait plus reproduction. Mais dans quel état, à quelle âge serait-on figés ? Puis, quelqu’un choisit « Et s’il y avait une révolution ? ». Qui serait concerné par ce processus et comment ? Que serait une révolution avec les moyens actuels ?
« Et si les toits de Paris devenaient un espace public où l’on serait tous connectés ? ». Qui serait en bas, qui serait en haut ? Cela pourrait-il changer, varier selon les activités ? Les trottoirs serviraient-ils de ferme agro-alimentaire ? Et s’il n’y avait plus de transports mais uniquement un réseau pneumatique ? Est-ce que la vie à l’échelle locale serait privilégiée ?
« Et si Paris était rasé ? ». Il ne resterait plus que la Seine. Comment réinventer la ville ? Serait-ce un nouveau territoire ? Quelle architecture serait choisie ? Les participants commence à imaginer un important travail sur la dépatrimonialisation…
« Et si on ne savait plus écrire ? ». Écrire c’est aussi transmettre, raconter et se raconter. Ne plus savoir écrire à la main signifierait-il ne plus savoir communiquer ? Est-ce que tout pourrait passer par l’œil. Et si le corps se transformer pour s’adapter à cette forme privilégiée de communication, les yeux deviendraient plus grands, les mâchoires plus petites…
« Et si tout était transparent ? ». Quel effet cela aurait-il sur le rapports entre sphères publiques et privées ?